“Queer As Folk” : 22 ans après, une série toujours aussi culte

La série anglaise “Queer as folk” a débarqué sur les écrans le 23 février 1999 et son remake américain un an plus tard. Plus de vingt années ont passé et on n’a finalement jamais rien revu de tel à la télévision. On vous explique pourquoi.

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Une série choc

Quand elle débarque à la télé en 1999, la mini-série anglaise Queer as folk est un choc. Enfin une série écrite par un gay, Russell T. Davies, qui parle des gays d’aujourd’hui sans faux semblant et avec une liberté de ton rare.

On y suit une petite bande d’amis/amants à Manchester. Stuart est un beau gosse cynique qui enchaîne les plans cul sans lendemain, avec son meilleur pote Vince, qui est secrètement amoureux de lui, ils traînent régulièrement sur Canal Street, la rue emblématique du quartier gay de la ville. C’est là que Stuart rencontre Nathan, 15 ans, dont il va tomber amoureux.

Un an plus tard, en 2000, la chaîne câblée Showtime lance un remake, transposé à Pittsburgh. Les personnages changent de nom. Nathan, devenu Justin n’a plus 15 ans, mais 17 ans… Après une saison qui colle globalement à la version originale, le Queer as folk américain s’en émancipe ensuite, en développant de nouvelles intrigues pour les personnages principaux et en donnant plus de place au couple lesbien qui a eu un enfant avec le personnage principal Brian (Stuart en anglais).

S’il ne fallait retenir qu’une scène, présente dans les deux versions, c’est celle où Stuart/Brian fait un annulingus à Nathan/Justin, le soir de leur premier épisode. Jamais on n’avait représenté cela à la télévision.

Une série pionnière

C’est la première série dont tous les personnages principaux sont gays. Elle a ouvert la voie à des séries comme Noah’s arc, Looking, Cucumber/Tofu/Banana, The New Normal, le remake des Chroniques de San Francisco, Special. En France, nous avons eu la websérie Les engagés. Malgré leurs qualités, aucune de celles-ci n’est parvenue à surpasser Queer as folk.

On n’en finit pas d’ailleurs de réclamer une suite à Russell T. Davies. Pour ne vexer personne, le scénariste promet régulièrement une « suite spirituelle ».

Une autre époque

Si Queer as folk marque à l’époque les esprits c’est en raison de son côté résolument actuel. 20 ans plus tard, c’est peut-être sa limite.

L’époque de Queer as folk, c’est une ère où les applis de rencontres géolocalisées n’existent pas, où le centre de la vie gay, c’est le clubbing (du moins c’est ainsi qu’on le représente) ; une ère où les homosexuels n’ont le droit de se marier nulle part (Les Pays-Bas deviennent le premier pays à ouvrir le mariage aux couples de même sexe en 2001) ; une ère où les coming-outs heureux sont encore la minorité ; une ère où la PrEP n’existe pas encore.

On notera aussi que la série manque de diversité. On y suit des personnages gays plutôt jeunes, tous blancs. Les séries actuelles ont en général toutes progressé sur ce point.

Pour le reste tout est là, les relations difficiles, le chemsex (qu’on n’appelle pas encore ainsi) et l’addiction, les couples sérodiscordants. Il y a même un attentat au Babylon, qui préfigure en quelque sorte celui du Pulse, à Orlando en 2016.

A l’image de la série star de l’époque, Sex and the city, Queer as folk est aussi et peut-être surtout une série sur l’amitié, la solidarité qui remplacent parfois des liens familiaux défaillants. C’est ce que le philosophe Didier Eribon appelait « l’amitié comme mode de vie », dans Réflexions sur la question gay.

Queer as folk anglais vs Queer as folk US

Dix épisodes d’un côté, quatre vingt trois de l’autre: la différence est d’abord quantitative. C’est lorsqu’elle dépasse l’intrigue de la version anglaise au début de la saison 2, que la série de Showtime devient la plus intéressante, en abordant au cours des quatre saisons suivantes tout un tas de sujets qui peuvent concerner les gays et les lesbiennes à un moment de leur vie. On peut voir les personnages mûrir, et être confrontés à nombre de situations qui leur font prendre de l’épaisseur.

Ensuite, la différence est la même qu’entre une série anglaise et une série américaine. La version anglaise est plus crue, moins léchée et moins consensuelle que sa petite sœur américaine. Plus authentique, pourrait-on dire. Et puis, comme souvent, on ne peut s’empêcher de préférer l’originale à la copie. Mais il faut voir les deux pour se faire une idée!

Que sont-ils devenus?

Russell T. Davies, l’un des scénaristes anglais les plus talentueux de ces vingt dernières années, a écrit Cucumber/Tofu/Banana, Years and Years, relancé Doctor Who (l’un des personnage du Queer as folk anglais est fan de Doctor Who) et travaille sur Boys, une mini-série sur les ravages de l’épidémie chez les gays au début des années 80.

Aidan Gillen, le Stuart de la version anglaise, est peut-être le plus connu de tous les acteurs ayant participé à Queer as folk. On a pu le voir dans Sur Ecoute (The Wire), Peaky Blinders, et surtout dans Game of Thrones, où il jouait le redoutable Littlefinger. Au cinéma, il joue notamment dans Bohemian Rhapsody et The Dark Knight Rises.

Charlie Hunnam (Nathan, QAF UK) est devenue la star de la série Sons of Anarchy.

Côté États-Unis, on a pu voir Gale Harold (Brian) dans Desperate Housewives et dans divers petits rôles dans toute une foule de séries.

Randy Harrison, alias Justin, est apparu récemment dans la série Mr Robot, mais c’est surtout au théâtre qu’il poursuit sa carrière. Yagg l’avait rencontré en 2010 à Paris lors de la convention Planet Babylon

Où les regarder?

Queer as folk n’est disponible hélas sur aucune plateforme de streaming légal. La version anglaise est disponible gratuitement sur le site de la chaîne Channel 4, mais cette dernière n’est accessible que depuis le Royaume Uni… Il vous faudra tricher avec un VPN.

La version américaine est disponible sur la chaîne Showtime mais il faudra vous abonner. En cherchant bien toutefois vous devriez pouvoir le trouver ailleurs…

Tu en veux encore ?