5 choses à savoir sur Stonewall, l’origine de la Pride

On a fêté l’an dernier les 50 ans des émeutes du Stonewall Inn, à New York, qui ont débuté le 28 juin 1969. Il ne s’agit pas exactement de la première fois où des clients d’un établissement gay se sont rebellés contre la persécution policière (il y a eu une révolte à la cafétéria Compton de San Francisco en 1966), mais c’est la plus marquante. A tel point qu’un an plus tard, sa commémoration donne naissance aux premières Gay Pride, qu’on appelle marches des fiertés LGBT+ en France. 
Jock.life vous raconte ce qui s’est passé lors de ces quelques nuits de 1969 au Stonewall Inn, que Barack Obama a classé Monument National en 2016. 

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1 – Le Stonewall Inn était un bar/club glauque. 

Si le Stonewall Inn, situé dans le quartier de Greenwich Village au 53, Christopher Street, était un bar populaire à New York, ce n’en était pas moins un lieu glauquissime. Il appartenait à la mafia locale. Il était sale. Les serveurs harcelaient les clients pour qu’ils consomment. Il n’y avait pas d’eau courante. Les boissons étaient coupées à l’eau. Les verres étaient lavés dans un bac d’eau sale. Et un sinistre individu du nom de Ed Murphy gérait un réseau de prostitués chargés de faire des avances aux clients les plus riches pour pouvoir les faire chanter ensuite. Que ce bar ait été populaire en dit long sur les lieux auxquels les personnes LGBT de l’époque avaient accès. 

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Le bar Stonewall Inn en 2018. Crédit : Massimo Salesi / Shutterstock

2 – Le déroulé des événements

Vers 1h30, 8 policiers débarquent au Stonewall, officiellement en raison des activités d’extorsion d’Ed Murphy. D’habitude, les policiers préviennent les patrons de leur descente, pas cette fois-ci. Les forces de l’ordre arrêtent le personnel et quelques clients (dont l’escroc Ed Murphy), puis procèdent à un contrôle d’identité de tous les autres, et les laissent sortir ensuite un à un. Alors que d’habitude les clients se dispersent après ce genre d’opération, cette fois-ci, ils restent devant l’établissement, pour accueillir celles et ceux qui sortent. Chaque sortie est applaudie, ou suscite des rires, si le client qui sort en rajoute dans la théâtralité (un plaisir que peu se refusent). Les policiers ne prennent pas de gants, à la grande colère des clients.

L’événement qui met le feu au poudre est l’arrestation d’une femme décrite comme une lesbienne butch par plusieurs témoins. Menottée, elle se débat vigoureusement contre les policiers qui tentent de la mettre à plusieurs reprises dans un fourgon. Elle crie alors à la foule “Pourquoi vous ne faites rien?”. C’est l’étincelle qui met le feu aux poudres. La foule s’embrase. Les policiers, très vite dépassés, se retranchent à l’intérieur. Les clients rejoints par des “street kids” des environs commencent à attaquer le bar. Les renforts tardant à arriver, les policiers sont à deux doigts d’ouvrir le feu. Le bain de sang ne sera évité que de justesse. S’ensuivent trois nuits d’émeutes, où selon plusieurs témoins les “drag-queens” (on dirait femmes trans aujourd’hui) et les prostitués se battent le plus férocement. 

3 – On ne sait pas qui a lancé la “première pierre” ou la “première brique”

On voit régulièrement passer des affirmations disant que telle ou telle personne a lancé la première brique aux policiers à Stonewall. Cet acte est souvent attribué aux militantes Marsha P. Johnson ou à Sylvia Rivera. Si les deux ont été indiscutablement présentes au cours des trois nuits d’émeutes, elles ont toutes les deux indiqué qu’elles n’étaient pas là au début. Et puis les émeutes n’ont pas commencé avec le jet d’une pierre ou d’une brique, c’est un enchevêtrement d’événements disparates qui a causé l’embrasement général. Longtemps restée mystérieuse, l’identité de la lesbienne butch (qui serait peut-être aujourd’hui un homme trans) a été levée il y a quelques années: il s’agirait de Stormé Delarverie, une figure du monde de la nuit undergound queer de ces années-là. Mais certains en doutent (Stormé étant connue, pourquoi n’a-t-elle pas été identifiée avant?). Au fond la question n’a pas grand importance, comme l’expliquent les intervenants de cette passionnante vidéo du New York Times. Les émeutes ont été un événement collectif. 

Marsha P. Johnson

4 – La mort de Judy Garland n’est pas à l’origine des émeutes

C’est une théorie un peu trop belle pour être vraie. La chanteuse et actrice, icône gay des icônes gays, grâce notamment à son rôle dans Le Magicien d’Oz et sa chanson Over the rainbow, est décédée à Londres quelques jours avant les émeutes de Stonewall. La légende veut que le chagrin ait mis les clients du bar dans un tel état qu’ils n’ont pas supporté cette descente de police de trop. Au risque d’en décevoir certains, aucun participant des émeutes n’a jamais évoqué ceci comme l’un des facteurs à l’origine des émeutes. 

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5 – Un après Stonewall, les premières Gay Pride

Le 28 juin 1970, trois marches commémorent en même temps à New York, Los Angeles et Chicago les un an des émeutes de Stonewall, sous le nom de Christopher Street Liberation Day. Ce sont les premières Gay Prides, qu’on appelle en France désormais marches des fiertés LGBT+. En France, la première marche a eu lieu en 1977. 

Pour en savoir plus:

Deux livres: Stonewall, the riots that sparked the gay revolution, par David Carter et Stonewall, par Martin Duberman. 
Un documentaire: Stonewall Uprising, de David Heilbronner et Kate Davis

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