Romans, BD, histoire : les 5 livres gays du moment

La beauté du diable

Maurice Swift a tout pour lui : la jeunesse, une beauté insolente qui fait craquer filles et garçons, et un vrai talent d’écriture propice à lui faire réaliser son rêve : devenir un écrivain célèbre. Sauf que s’il sait écrire, Maurice n’a rien à raconter : pas une once d’imagination. Alors il va se nourrir de celle des autres, comme ce vieux romancier qu’il séduit, auquel il vole un épisode pas très glorieux de sa vie, et qu’il abandonne à peine son livre paru… Il y en aura d’autres, et l’Irlandais John Boyne (déjà auteur des excellentes Fureurs invisibles du cœur) dessine avec brio le portrait complexe de cet imposteur diabolique à qui on donnerait le bon dieu sans confession… Inventif, intelligent, plein de surprises, L’Audacieux Monsieur Swift est, à l’instar de son héros, un sombre enchantement.

John Boyne, L’Audacieux Monsieur Swift, éd. JC Lattès, 22, 90 €.

Les temps de l’amour

C’est une romance à travers les époques que nous raconte ce court roman de science-fiction, une romance entre deux soldats de la Seconde Guerre mondiale dont un bouquiniste trouve la trace lorsqu’il déniche, dans un vieux bouquin médiocre intitulé Le temps fut, une lettre d’amour. Intrigué, il cherche à en savoir plus sur ces deux inconnus, et ce qu’il va découvrir va l’entraîner — et nous avec — à travers les époques, puisque les deux amants semblent avoir traversé le temps et les événements sans jamais prendre une ride… Très habilement troussé, le récit de Ian McDonald séduit même si on n’est pas fan de SF.

Ian McDonald, Le temps fut, éd. Bélial, 9, 90 €.

Kings & queens

Après s’être intéressée aux sorcières et aux grandes figures du lesbianisme, l’historienne Louis-Marie Libert se penche sur les amours masculines de souverains de toutes les époques et de toutes les civilisations. Certes, elle n’est pas la première à se pencher sur cette histoire secrète des grands de ce monde, mais elle le fait avec autant de verve que d’érudition, alignant comme à la parade papes, pharaons, rois d’Angleterre et de France, sultans ottomans, conquérants grecs… et leur goût interdit pour les éphèbes. Une instructive et originale relecture de l’histoire officielle.

Louise-Marie Libert, Amants de rois, éd. Jourdan, 19, 90 €.

James et son double

On n’en finit pas de redécouvrir James Baldwin, immense écrivain noir et gay dont l’œuvre incandescente est peu à peu rééditée. Si son chef-d’œuvre est certainement l’extraordinaire Chambre de Giovanni que tout homo se doit d’avoir lu, L’homme qui meurt (paru en 1970 et enfin disponible en poche) vaut lui aussi largement le détour. Portrait d’un acteur célèbre terrassé par une crise cardiaque et qui se remémore son passé, c’est un roman puissant et inoubliable (comme son personnage central), inspiré de nombreux épisodes de la vie de Baldwin — la jeunesse pauvre, l’adolescence au temps de la discrimination raciale, etc.

James Baldwin, L’homme qui meurt, éd. Folio, 9, 70 €.

BD XXL

Composée par Nicolas Wanstock, responsable du rayon BD à la librairie gay Les Mots à la Bouche, cette épatante compilation réunit 13 bandes (dessinées) très excitantes signées par certains des auteurs majeurs du genre, de Gengoroh Tagame à The Amir. Pour la plupart inédites en France, ces histoires sont l’occasion de découvrir des styles très divers, illustration si besoin était de la créativité des artistes gay d’hier et d’aujourd’hui. C’est d’ailleurs ce que souligne Nicolas Wanstock dans sa très éclairante introduction, où il retrace à grands traits l’histoire de ces BD PD nées dans les années 1930, dont il rappelle les grandes étapes et les grands noms, Tom of Finland et Ralf König en tête. Un bel ouvrage aussi passionnant que sexy.

Nicolas Wanstock, TTBM, la compilation de BD gay très très bien montée, éd. La Musardine, 19 €.