On a parlé avec le réalisateur queer Antony Hickling de son nouveau film “Une nuit à Paris (Down in Paris)”

On connaît Antony Hickling pour ses films poétiques et expérimentaux , à l’image de sa trilogie queer « Little Gay Boy » qui l’a révélé dans les festivals internationaux. Il revient aujourd’hui avec « Down in Paris », déambulations nocturnes pleines de surprises et de rencontres dans les rues de la capitale. Après une sortie en salle, le film vient de sortir en DVD chez Optimale avec, pour l’occasion, un titre en français “Une Nuit à Paris”. Jock.life a rencontré le réalisateur.

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Que raconte Down in Paris ?

C’est un film sur un homme qui arrive à un certain âge et qui est à un croisement dans sa vie. Il cherche des réponses. À l’origine, je n’ai pas écrit ce film pour jouer dedans. Ça ne m’intéressait pas. J’ai d’abord cherché un acteur pour le rôle. Puis j’ai fini par admettre que je pouvais le jouer : je m’inspire dans ce film comme dans les autres, de ce que je connais. Je voulais surfer en écrivant Down in Paris sur un fil entre réalité et fiction. Scène par scène, le film dévoile qui est cet homme à travers ses rencontres… Le personnage de Richard [ndlr : le héros du film] se dévoile en se posant des questions existentielles pour trouver des réponses sur le sens de sa vie et surtout sur son avenir…

Antony Hickling (c) Nicolas Deleplace

Tu insistes beaucoup sur le fait que Richard est avant tout un personnage, mais il y a une part autobiographique dans le film ?

Bien sûr qu’il y a une part autobiographique dans mon film. C’est toujours le cas dans les créations. Même dans Star Wars, il y a une part de vécu du réalisateur… On ne peut pas écrire une telle histoire sans se dévoiler un peu… Et c’est d’ailleurs le cas dans tous mes films…

Down in Paris est visuellement ton film le moins expérimental. Est-ce qu’il n’est pas le signe d’un virage dans ta carrière ?

J’avais l’idée de faire Down in Paris. Mais pour plus tard… Et le film sur lequel je travaille actuellement, devait prendre chronologiquement la place de Down in Paris. En travaillant sur ces deux idées, je me suis rendu compte qu’il me fallait inverser l’ordre de création de ces deux films. Down in Paris est arrivé vraiment au bon moment en fait, contrairement à ce que j’imaginais. Ce film est le lien entre ce que j’ai fait et ce que je vais faire. Il est parfaitement à sa place. Et je ne me suis rendu compte de tout ça qu’après… C’est une évidence. C’est peut-être d’ailleurs pour ça que j’ai joué le rôle, comme un retour normal à mon métier initial de comédien, après cette période où je m’étais concentré sur la réalisation…

Antony Hickling / DR

Comment le film a-t-il été accueilli dans les festivals où il a été présenté ?

Down in Paris a reçu le prix du meilleur long métrage à The Chicago LGBTQ+ International Film Festival en octobre 2021 et je viens tout juste de recevoir un prix pour ma performance d’acteur au Reelout Queer Film Festival au Canada. Le film voyage beaucoup et est très bien accueilli. Mais en règle générale, j’écoute assez peu les critiques et les réactions. Quand je travaille, je m’entoure de peu de gens. Je reste dans ce que j’ai envie de faire… Je ne veux pas plaire à tout prix. Je veux d’abord rester fidèle à moi-même, à mon travail de recherche… Qu’on aime ou qu’on n’aime pas… Sur Little Gay Boy, mon premier film, si j’avais écouté les autres, je n’aurais rien fait d’autre…

Jean-Christophe Bouvet (c) Nicolas Deleplace

Dans la scène du plan à 3, tu te montres nu avec tous les stigmates de l’âge… Quel est ton rapport avec l’âge ?

Je suis de mieux en mieux dans mes bottes. Je suis très très bien. Je n’ai jamais eu ce sentiment de peur du temps qui file, de l’âge qui avance. Au contraire, c’est de mieux en mieux. Je n’avais pas peur de la nudité. J’en ai même joué. Juste avant cette scène dans la backroom, je rencontre un très beau mec, le genre sur qui on a l’habitude de fantasmer. J’ai pourtant choisi de faire la scène de sexe avec des garçons qui ont un corps « normal ». Je ne voulais pas de mannequin. Je voulais du vrai, de la réalité. On n’est pas tous des super beaux mecs. Je voulais aussi donner un message positif vis à vis de l’âge, du corps… Je viens du théâtre et comme c’est souvent le cas chez les acteurs de théâtre, j’ai un rapport avec la nudité très libre. Et comme j’ai demandé beaucoup aux acteurs de mes autres films, je n’allais pas, parce que c’était moi qui étais devant la caméra, me cacher…

Jean-Christophe Bouvet, Manuel Blanc, Dominique Frot reviennent et jouent dans Down in Paris. Il y a une bande autour de toi ?

Plutôt qu’une bande, je dirais une famille. Je suis quelqu’un d’assez fidèle et j’aime travailler avec eux. Je me sens plus à l’aise. Nina Bakhshayesh, qui joue Elizabeth dans la scène du bar, est une amie que je connais depuis mes 18 ans. Et pour revenir à mes origines théâtrales, j’aime l’idée de troupe…

Mike Fédée et Antony Hickling / DR

Quel cinéma aimes-tu ?

C’est drôle que tu me poses cette question. A mes débuts, j’ai dit dans une interview que j’aimais Derek Jarman… Du coup, tout le monde a pensé que je me prenais pour Jarman ou Pasolini. Alors que je ne me suis jamais pris pour personne… Mais je me suis inspiré de ce que je connais, de ce qui me frappe, me parle. J’aime Jarman, j’aime Fellini et Antonioni, comme Pasolini. J’aime le cinéma italien… Peut-être grâce à mon grand-père sicilien. Je me sens inspiré par Shakespeare aussi : il y a du Shakespeare dans pratiquement tous mes films.

Une nuit à Paris (Down in Paris), d’Antony Hickling en DVD et VOD chez Optimale.

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