DVD gay : “Entre les roseaux”, le temps d’un amour
Sortie en DVD et VOD de ce film finlandais qui raconte la romance fragile entre deux garçons que rien n’aurait dĂ» rapprocher.
On aurait pu titrer ce film Chronique d’un été, tant la saison, ces soirs qui s’attardent sur les beaux paysages finlandais, les lacs, les forêts, est importante ici. Et tant tout ce qui se déroule sous nos yeux — la naissance d’un amour et ce qui s’ensuit — est concentré dans ce court laps de temps. Pourtant, ce serait négliger une dimension essentielle du film, sans doute plus présente dans l’image des roseaux : des plantes en apparence fragiles qui plient mais ne rompent pas, si on se souvient bien des fables de La Fontaine.
Or c’est bien de cela qu’il est question, au cœur de cet été finlandais : d’un amour fragile entre deux jeunes hommes que rien n’aurait dû rapprocher, mais d’un amour qui, peut-être, résistera aux orages qui grondent.C’est donc une romance contrariée que met en scène, pour sa première réalisation, Mikko Makela, celle qui réunit Leevi et Tareq. Le premier, aussi blond que l’autre est brun, aussi imberbe que l’autre est poilu, a quitté la Finlande pour faire des études de lettres en France, mais aussi pour s’éloigner d’un géniteur avec lequel il ne s’entend guère, notamment en raison de son homophobie. Il revient dans son village natal pour aider son père à restaurer le chalet d’été familial qu’il a besoin de vendre. Mais comme Leevi n’est pas très bricoleur, son père engage Tareq, un réfugié syrien…
A peine le paternel éloigné pour une nuit, les deux hommes se rapprochent, et s’aiment. Et si Mikko Makela filme avec une certaine sensualité (et quelques clichés pour “faire joli”) leurs corps qui se touchent et s’enlacent dans la pénombre, il parvient surtout à donner à voir, entendre et ressentir ce qui se joue après ces ébats. Et c’est bien sûr le dévoilement essentiel de ces deux jeunes gays : ils échangent des confidences sur leur passé, sur ce qu’ils ont dû affronter, sur ce dont ils ont cherché à s’échapper l’un et l’autre pour s’affirmer, pour essayer de s’épanouir et d’être eux-mêmes.
Cela n’a évidemment rien à voir, et pourtant c’est presque pareil, et cela les rapproche : Leevi a quitté un pays réactionnaire et pas très ouvert sur les questions LGBTQI ; Tareq a fui, au péril de sa vie, un pays en guerre où l’homosexualité est interdite. Leevi a pris ses distances avec un père homophobe et raciste ; Leevi a abandonné la famille (femme et enfants) qu’il avait dû bâtir pour cacher ses véritables désirs…
Ce contexte politique très présent, cette inscription dans une actualité brûlante — celle des migrants et réfugiés homosexuels et transgenres, de l’asile qui leur est accordé ou non en Europe, de leur intégration dans leurs pays d’accueils, etc. — donnent un relief particulier à cette romance. On ne dira rien de ce qui succédera à cette nuit, on ne racontera pas la suite de cet amour ébauché-là, parce que même si Entre les roseaux ne joue pas sur le suspense, il faut laisser se déployer l’émotion qui nous étreint tandis que le film avance vers sa fin.
Film sensible porté par deux séduisants comédiens débutants, Entre les roseaux n’est pas exempt de quelques maladresses : il n’en distille pas moins un vrai charme.