Jérôme Pellerin-Moncler, le photographe qui ne s’arrête jamais

D’abord graphiste, Jérôme Pellerin-Moncler est un touche-à-tout. Il a besoin d’explorer, de découvrir… La photographie, l’ornement, le costume ou encore le décor, dès qu’il ressent une envie, il se jette à l’eau. Et nous avec lui…

Publié le

D’où vient ton inspiration ?

La peinture « classique » est centrale pour moi, avec une préférence pour le baroque et les néo-classiques du XIXème siècle. Tous ces tableaux remplis de modèles qui ont oublié de s’habiller… Ensuite, il y a l’opéra et le cinéma qui sont fondamentaux. J’ai une attirance toute particulière – voire obsessionnelle – pour Peter Greenaway, Jacques Demy ou Bob Wilson… Et enfin la photographie… Le maître incontesté reste George Platt-Lynes, pour son érotisme si moderne, et ses images imprégnées de dramaturgie. Mais j’ai aussi une tendresse infinie pour Bob Mizer qui, selon moi, jette les bases de l’homoérotisme qui nous traverse encore tous aujourd’hui.

Quelle est ta définition de la beauté ?

Ouch… C’est compliqué… Il y a la beauté qui me touche… et celle que je tente d’approcher quand je travaille. Ce ne sont pas les mêmes. Je suis toujours beaucoup plus bouleversé par les images que je ne saurais pas faire. Je suis, par exemple, fasciné par les photographes qui travaillent les corps « ordinaires » ou cassés, les « gueules ». C’est souvent d’une grâce absolue. C’est bouleversant. Mais j’en suis incapable. Pour des raisons qui m’échappent, j’ai besoin que les choses soient sophistiquées et extrêmement construites. En tous cas, la beauté n’a rien à voir avec un corps « idéal » répondant aux canons d’une époque.

Dans ta bio sur Instagram, tu écris que tu cherches des modèles. Quel type de garçons as-tu envie de photographier ?

C’est très simple : chaque garçon que je prends en photo appartient à mon idéal masculin. La palette est assez large, mais mes modèles ont en commun d’être habités par un mélange de grande douceur et de malice gourmande.

Je pense souvent au personnage de Maxence dans Les Demoiselles de Rochefort qui a peint son idéal mais qui le cherche éperdument.  Moi, d’une certaine manière, je prends les miens en photos. En fait : je prends en photo des garçons qui m’inspirent. Tout simplement. Et j’adore ça.

Jérôme Pellerin-Moncler

L’iconographie religieuse est très présente dans ton travail. D’où ça vient ?

Je ne sais pas. Je me suis souvent posé la question car je ne suis pas croyant. Mais je sais que je suis envouté par la peinture et la sculpture religieuse depuis mon enfance. J’y vois plusieurs raisons possibles : un homoérotisme évident, auquel j’ai été sensible très tôt. Une iconographie très dramatisée, voire doloriste ou macabre. Un sens du tragique aussi, et du théâtre.

Crédits photo : Jérôme Pellerin-Moncler

Te considères-tu plus comme graphiste ou comme photographe ?

Je suis un graphiste qui fait des photos. C’est très exactement comme ça que je me suis toujours défini… d’autant que la photo a longtemps été un médium avec lequel j’entretenais des rapports contrariés. Même si je m’entends mieux avec elle aujourd’hui, la photographie reste souvent pensée comme le dessin ou la peinture. Et le travail que j’effectue en post-production s’apparente vraiment aux retouches que fait un peintre sur son tableau.

Tes modèles ont souvent des accessoires sur eux, chapeaux, fraise, voile… Comment construis-tu les histoires de tes photos ?

Les accessoires et les ornements des modèles ont une origine précise : les photos réalisées au début de mon travail étaient destinées à devenir des dessins ou des silhouettes. J’aime travailler ce qui relève de ce que j’appelle rapidement la « panoplie » (comme le déguisement d’un enfant : panoplie de pompier, de cowboy ou se super-héros). Travailler la figure du marin, du cowboy… pour les croiser (Batman et Zorro), les érotiser ou les dévier (le soldat en toile de Jouy, le marin avec sa fraise à rayures).

Quel est ton plus beau souvenir de photographie ?

Le hasard veut que mon plus beau souvenir remonte à ma dernière séance photo. Elle a été complètement improvisée. Mais il s’est passé quelque chose de magique avec le modèle. Quelque chose de l’ordre de l’évidence. C’est allé très vite, mais chaque série de photos était juste. Sans même beaucoup parler… il a proposé des choses dans l’esprit de mon travail mais auxquelles je n’aurais pas pensé seul. Et de mon côté, je me suis laissé porter par ces propositions, j’ai accepté de moins contrôler.

As-tu des projets en cours ?

Oui, exposer un triptyque en bois découpé autour de la Passion du Christ à Lille au Printemps prochain. Rééditer une série de mon « Sébastien » et développer des objets de décoration. Et surtout : continuer à prendre des garçons en photo et à (les) dessiner. Encore et encore.

Vous pouvez retrouver Jérôme Pellerin-Moncler sur Instagram et sur son Tumblr.

Crédits photo : Jérôme Pellerin-Moncler

Tu en veux encore ?