Lolla Wesh : “Mon spectacle “Coucou”, c’est pas mal d’ascenseurs émotionnels”

Son “Coucou”, prononcé d’une fois rauque et gutturale, est devenu mythique et donne son nom à son “one-queer-show” : Arnaud Yves Dardis, alias Lolla Wesh, nous parle de son spectacle, de drag, d’after-work et… de Mylène.

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Comment est né le personnage de Lolla Wesh ?

Au départ, c’est une private joke, un clin d’œil tendre à mon amie effeuilleuse et crooneuse belge Lolly Wish. Je me suis inspiré des “sosies” de Johnny Hallyday chez qui rien ne va. Lolla Wesh, c’est pareil : elle croit ressembler à Lolly Wish, parce qu’elle en est fan. Ensuite, la blague est devenue virale, jusqu’à se transformer en prétexte pour transmettre des messages activistes, militants et pédagogiques. Ceux-ci portent principalement sur les conditions des LGBTQI+ (car nous avons encore du chemin à faire pour atteindre l’égalité), mais aussi sur les questions féministes, car la communauté gay reste très sexiste.

On assiste ces dernières années à une véritable explosion de la scène drag, à Paris et partout en France, avec de plus en plus de performers et de lieux où se produire. Qu’est-ce que cela t’inspire ? Pourquoi maintenant, selon toi ?

Je crois que c’est surtout la médiatisation et les réseaux sociaux qui mettent cet art en lumière. Rien n’est nouveau : nous essayons de nous réinventer, mais nous nous inscrivons toutes et tous dans le sillage de ce qui a déjà existé. Simplement, le drag n’est plus aussi underground qu’à une certaine époque : RuPaul l’a fait connaître au grand public et il devenu plus accessible et plus populaire. À la fin des années 70, les drags et les travestis étaient plutôt punk ; beaucoup vivaient dans la rue et certaines étaient travailleuses du sexe. Les drags, les travestis et les personnes transgenres formaient une seule et même communauté, qui s’est démenée pour l’égalité des droits. La jeune génération devrait s’intéresser de près à l’histoire de nos modèles et précurseurs, comme Marsha P. Johnson et Sylvia Rivera. Tout vient de là. Cependant, je suis fasciné par la diversité d’identité, d’inventivité et de volonté qui existe actuellement dans le drag.

Crédit : Ève Saint-Ramon

Quand tu sors en after-work dans des bars, est-ce en Lolla ou en Arnaud ? Et quels sont tes lieux préférés ?

J’adore finir mes journées de travail au Duplex, dans le Marais à Paris. C’est un bar de pédés intellos. On a presque tous des lunettes… Il y a des expos et souvent les mecs parlent plus littérature et art que politique. Mais je n’y suis jamais allé en Lolla… J’aime aussi énormément le M’sieurs-Dames, dans le 11e arrondissement : c’est un petit bar convivial et inclusif, où les gens sont bienveillants. Il y a des animations de drags et d’autres divertissements queers tous les soirs de la semaine. D’ailleurs, j’y contribue avec mon after-work, qui prend le contrepied de la masculinité toxique avec autodérision et humour. Ça s’appelle la Furiozoa, la soirée “masc 4 mascara” qui propose un atelier maquillage et une tombola. C’est tous les premiers jeudis du mois, et là j’y vais en Lolla.

Tu es souvent étiquetée comme “artiste queer”. Qu’est-ce que cela signifie pour toi ?

C’est assez difficile d’expliquer cette étiquette. Je l’assume, car mes positions politiques sont queers, mais je constate que ce mot est beaucoup galvaudé aujourd’hui. Ça me navre de voir que c’est devenu un label utilisé pour estampiller un acte, un look, une personne ou une soirée “à la mode”. On pourrait presque parler de queerwashing. D’ailleurs, mon spectacle dénonce ce côté marketing en se présentant comme un “one-queer-show”. Selon moi, avant d’être une mode sur laquelle même Mattel peut surfer pour faire de la pure récupération, le queer est une volonté politique, une révolution, une envie de tout changer.

Crédit : Ève Saint-Ramon

On te décrit également comme “la Mylène Farmer de l’humour”. Tu es fan ?

J’ai été un fan inconditionnel lorsque j’étais enfant et ado. En grandissant, j’ai tempéré mes ardeurs, mais il y a quelque chose que je ne peux pas renier : cette artiste m’a accompagné dans mon évolution artistique et littéraire. Ses textes m’ont permis de poser des mots sur mes émois d’enfant gay. Sa carrière nous a tous accompagnés, qu’on l’admire ou qu’on la déteste. Mylène est une pierre dans la construction sociale de certaines personnes LGBTQI+, n’en déplaise aux gays masculinistes.

Crédit : Ève Saint-Ramon

À quoi doit-on s’attendre lorsqu’on va voir ton spectacle Coucou ?

À prendre une claque, de rire mais aussi d’émotion. Je ne voudrais pas spoiler, mais vu que c’est un spectacle d’humour qui présente une satire de la société, il faut s’attendre à du cynisme, à des contrepieds et à de la provocation, avec pour but de faire réfléchir. Mais comme l’écriture est autobiographique, il contient aussi pas mal d’ascenseurs émotionnels. Un soir, à la sortie d’une représentation, une femme m’a dit une chose qui m’a vraiment touché : “Coucou est présenté comme un spectacle drôle, mais on ressent une vraie souffrance à travers votre humour”. J’ai aimé ce commentaire, car c’est exactement l’endroit où je veux emmener le public.

“Coucou” sera en tournée dans les prochains mois à Lyon (au Rideau rouge), Caen (au Burlesque Klub), Marseille (à L’Art Dû) et Toulouse (à La Comédie) : retrouvez toutes les dates ici.

Vendredi 15 novembre, Lolla Wesh animera également un “queer quiz” au Loft à Toulouse.

On peut aussi retrouver Lolla sur son site, sur FacebookTwitterYouTube et Instagram.

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