Noholito : « J’apprends déjà à être heureux »
Le créateur de vidéos drôlissimes aux 3,9 millions d’abonnés TikTok nous parle de lui, de son métier et de son nouveau livre, “28 ans d’angoisse” (Editions First). Pertinent, drôle et utile, l’ouvrage aidera les petits et les grands inquiets. Confidences sincères avec l’accent chantant.
Vous considérez-vous comme un influenceur, un comique ou un créateur de contenus ?
Influenceur, je trouve ça péjoratif. Influencer qui ? Ça me met mal à l’aise. Dans la tête du commun des mortels, c’est souvent quelqu’un qui vend des produits. Alors je vais plutôt me dire créateur de contenus, surtout que je ne pensais pas un jour pouvoir vivre de ça. Je suis arrivé sur Instagram en 2018, ensuite sur Youtube, où je tournais des vidéos et faisais du montage, donc je vais dire créateur de contenus.
Quelques célébrités de Youtube sont passés au stand-up, est-ce quelque chose qui vous fait rêver ?
Avant d’imaginer ce genre de choses, j’essaie de soigner mes crises d’angoisse et le stand-up, le monde et tout, pour l’instant, ça n’est pas du tout envisageable. Je n’en regarde pas beaucoup, à part Florence Foresti, que j’adore.
Quand vous décidez de raconter votre parcours jalonné de crises d’angoisse, aviez-vous l’envie de faire rire avec un tel sujet ?
J’étais partagé : à l’intérieur de moi, il y a le James très calme, posé, sérieux qui a fait des études de droit, et aussi le mec déjanté, gourgandine, qui dit n’importe quoi. J’ai commencé à écrire de façon sérieuse et en relisant, des choses drôles me venaient. Le but n’était pas d’être drôle, mais quand mes conneries sont sorties, je les ai ajoutées.
Qui sont les comiques qui vous ont fait rire, enfant ?
Les Inconnus, avec Stéphanie de Monaco, j’ai adoré, leurs shows et leurs films. Les Visiteurs aussi. Elie Kakou, se déguisait, non ? Ma mère le regardait, mais moi je ne regarde pas trop les comédies françaises. Les Tuches 1 un, j’ai ri. Les comédies américaines, je les trouve souvent sur-jouées.
Vous écrivez que quand vous étiez un enfant, très jeune, on avait défini votre sexualité avant vous….
Tout le monde se permettait d’étiqueter ma sexualité bien avant que je ne le sache moi-même. J’étais efféminée, je me déguisais en fille. À l’école, même les adultes en parlaient, en faisaient tout un plat alors que je m’en foutais, je voulais juste m’amuser avec mes amis. J’ai donc mis du temps à me connaître, à en parler et même si je savais que mes parents ne me rejetteraient jamais, j’ai mis du temps à leur dire. J’avais l’impression que je devais à tout prix répondre à cette question, alors que je ne me la posais pas.
Vous évoquez clairement un harcèlement scolaire, beaucoup de violence homophobe reçue, vous racontez les moqueries quotidiennes dans le bus scolaire…
Oui. À un moment, à force d’en recevoir tellement, ça devient une habitude, le quotidien. C’est en écrivant ce livre, et avec ma psy que je me suis rendu compte que ça n’était pas normal, j’avais intégré le fait d’être moqué. On ne me frappait pas mais le jour où je n’entendais rien, aucune moquerie, c’était jour de fête.
A votre façon, vous assurez une visibilité aux gays. Dans une vidéo, vous essayez une tenue de sirène commandée sur Amazon…
Pour Halloween, je vais avoir une tenue de sorcière sexy, le lendemain une tenue plus masculine disons. Je fais ce que je veux, oui je suis efféminé, oui, je fais ça, c’est un message implicite, je ne porte pas vraiment de message militant
Recevez-vous encore des commentaires homophobes ?
Non je n’en reçois pas ou alors des gamins de 11 ans, c’est tellement rare. Je m’habille de façon banale. Ce qui est triste, c’est que la société accepte de plus en plus les gays à condition qu’ils entrent dans les codes. Bilal Hassani, j’ai entendu parler sur Twitter des messages qu’il a reçus. Aujourd’hui, il est à Danse avec les stars. Ça touche une large audience, il a énormément de talent.
Vous évoquez les origines de vos crises d’angoisse, et vous détaillez les types de thérapies. Recommandez-vous à votre public jeune de se faire aider quand le besoin s’en fait sentir ?
Oui. Si les crises d’angoisse prennent le pas sur la vie de la personne, qu’elle commence à faire de moins en moins de choses, qu’elle se renferme sur elle-même, il faut se faire suivre et trouver une alchimie avec un thérapeute. Quand ça ne marche pas, c’est souvent parce que ça n’est pas le bon thérapeute.
Votre récit est à la fois émouvant et amusant, diriez-vous qu’être joyeux, c’est faire quelque chose de ses angoisses ?
Disons que ça m’a permis de sortir de la tête de l’eau, de m’évader, de relativiser. Faire mes vidéos me permet d’oublier ce quotidien, être joyeux me permet de sortir tout ça.
Vous dites tomber sur des garçons manipulateurs qui utilisent vos peurs, et vous vous présentez comme dépendant affectif. Comment ça se passe en ce moment, en amour ?
Au lieu d’essayer de combler un vide, un manque, j’apprends à m’aimer complètement au lieu d’aller vers des hommes. J’apprends déjà à être heureux seul et je verrai plus tard quand ce chemin sera fait, si quelqu’un veut venir dans ma vie pour être un plus et non pas juste un boulet. C’est tout bête, mais avant, je me disais que pour prendre un verre de vin dans mon jacuzzi gonflable, il ne fallait pas être seul. Aujourd’hui, je le fais, je suis content. J’arrive à profiter des moments de solitude, ça n’est pas pénible
Quel conseil donneriez-vous à un garçon influenceur, qui débute, au lycée ou très jeune ?
Déjà, de ne pas arrêter ses études, tout ça c’est éphémère, ça s’arrêtera. Peut-être y aura-t-il un autre réseau social… Je conseille aussi de bien s’entourer et de garder la tête sur les épaules, c’est éphémère. Un bad buzz et ça peut s’arrêter très vite.