JĂ©romeuh : “Je continue Ă  faire ce que j’ai toujours fait : parler de ma vie d’homosexuel Ă  travers mes dessins.”

Que ce soit dans ses livres ou sur Instagram, JĂ©romeuh raconte avec autodĂ©rision sa vie de gay trentenaire, Ă  travers sa relation avec ses amis, son copain ou son corps. Alors qu’il dĂ©bute un nouveau projet consacrĂ© Ă  une survivante de la Shoah, nous avons voulu en savoir un peu plus sur lui.

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Le dessin, c’est venu comment ? 

Comme pas mal de gens, on m’a mis du papier et des crayons dans les mains quand j’étais enfant. À la différence d’autres personnes, j’ai continué. J’aurais voulu suivre une formation académique dans le dessin mais ça n’a pas été possible, du coup je suis autodidacte.

Comment décrirais-tu ton style?  

Comme je te disais, j’ai appris le dessin tout seul. Mes inspirations du début sont les références graphiques des gens de ma génération, les dessins animés du club Dorothée ( j’aimais bien les Chevaliers du Zodiaque et Nicky Larson), mes jouets ( j’avais une poupée Barbie et des GI Joe)… Puis, en grandissant, j’ai été fasciné par la peinture, le cinéma, l’architecture et la sculpture.. Mais ça ne se ressent pas dans mon style. J’adore Picasso, Voutch, Mallet Stevens, Cocteau, Renoir (le cinéaste, pas le peintre).

Mon style, il est nourri des goûts de mon enfance et contraint par mes limites (et ma fainéantise ). En gros je le définirais par : comme je peux, comme ça tombe. Ah aussi, j’aimais bien Les triplés de Nicole Lambert dans Madame Figaro quand j’étais petit. Je me jetais dessus. Je pense que ça a un peu joué sur mon style.

Quels sont tes modèles de dessinateur / dessinatrice?


J’adore Brétecher, Voutch, Windsor McCay, Bill Watterson. Penelope Bagieu m’épate. Sinon dans mes inspirations et mentors en tant que scénariste, il y a Hubert qui était un ami et qui nous a quittés cette semaine. Je l’avais rencontré quand nous avions travaillé ensemble pour un chapitre de la BD Les Gens normaux chez Casterman. C’était devenu un ami cher. C’était un grand, un auteur exigeant, militant, brillant.. qui a beaucoup fait pour la représentation des LGBTQI+ dans la bande dessinée. Ce serait d’ailleurs bien que vous consacriez un article étoffé sur son oeuvre.

Tu étais impliqué dans le “Projet 17 mai” : est-ce que tu continues à militer d’une manière ou d’une autre?

Je continue à faire ce que j’ai toujours fait, parler de ma vie d’homosexuel à travers mes dessins. Est-ce que c’est militant ? Je ne sais pas. Je suis persuadé que pour faire avancer les droits et défendre la place des LGBTQI+ dans la société, il faut lutter contre toutes les discriminations. C’est un effort de tous les jours dans la vie. Je ne sais pas pour les autres, mais perso je suis obligé de me corriger ou de changer de perspective régulièrement sur mon comportement. Il y a tellement, tellement de choses qu’on prend pour acquises ou normales dans notre vie et qui sont des composantes d’un système d’oppression d’une partie de la population. C’est ça ma façon de contribuer à la cause LGBTQI+, essayer d’être moins con moi-même, et y’a du taf.

Après« Un garçon au poil » et « Les petites histoires viriles », as-tu d’autres projets de livre?

Oui, je viens de commencer à publier en ligne Shoahgram sur Instagram. C’est l’histoire vraie d’une survivante de la Shoah, Yoheved, née juive dans les années 30 en Pologne, qui a été déportée dans le Ghetto de Varsovie. Je mets une partie sur Instagram chaque semaine, au fur et à mesure que nous progressons Yoheved et moi. A la fin, ce sera un livre physique. J’espère que le plus grand nombre de gens lirons et partagerons son histoire. Suivez nous : @shoahgram.

Que préfères-tu dessiner et quels sont les thèmes que tu préfères aborder? 

Ce qui me fait rire, m’émeut, m’intrigue… Ce qui contribue à apporter du sens à ma perspective sur le quotidien. Et les animaux. Et les gens que j’aime.

Tu te mets beaucoup en scène et souvent avec beaucoup d’autodérision, sur toi, ton corps, ta vie de couple. C’est une forme de thérapie? 


C’est surtout une habitude que j’ai prise et une manière d’essayer de me rendre intéressant. Certains tiennent les autres au courant de leur existence en postant un selfie ou une photo de leur chat. Je fais un dessin. C’est un pansement narcissique. Aussi c’est un truc qui m’apaise, ça me rend heureux de dessiner… Et si on oublie la pollution qu’entraîne le stockage de la data, c’est une occupation qui nuit peu aux autres… alors je le fais. Il faut bien faire quelque chose de sa vie quand on ne regarde pas Netflix.

Retrouvez Jeromeuh sur Instagram: https://www.instagram.com/jeromeuh/

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