La Big Bertha : “Aujourd’hui, je vis ma meilleure vie”

C’est une reine incontestée ! Outre son émission de télé, « Mini Cooking », disponible sur 6play, elle produit la reprise d’un spectacle avec Soa de Muse et Elips, « Excuse my french » (le 18 novembre, au Rex, à Toulouse) et fait partie du casting de « Queendom » (le 23 novembre à Paris). Mais ça n’est pas tout, elle est en résidence culinaire à la très queer péniche dîner-spectacle La Nouvelle Seine, avec les chefs Toko Essom et Muriel Aublet-Cuvelier. Comment vit-elle ce succès ? Elle nous raconte tout, espiègle et engagée. Délicieuse.

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Vous souvenez vous du jour où vous avez choisi votre nom de scène ? La grosse bertha était à l’origine un canon, une arme…

Oui, bien sûr, j’ai choisi ce nom parce qu’il est en rapport avec la Grosse Bertha, une drag de chez Jean-Marie Rivière, l’un des premiers à avoir créé une troupe, Les incroyables, pour une revue qui faisait le tour du monde. Et dans le civil, aujourd’hui, tout le monde m’appelle Big. Sinon le public m’appelle Bertha.

Vous faites du drag depuis 10 ans, après avoir été comédien de théâtre et on peut vous voir chanter en live, au Cabaret Le secret notamment. Pourquoi ne vous présentez-vous pas comme chanteuse ?

Oh mais je dis que je suis chanteuse… sous la douche. Je ne me considère pas comme une chanteuse, plutôt comme une conteuse.

(c) Eve Saint Ramon

Vous voguez de projet en projet, diriez-vous que vous êtes plus heureuse que jamais ?

Oui, je vis ma meilleure vie, je vis de ma passion et je n’ai pas à me plaindre :  j’ai un toit sur ma tête et je mange à ma faim. J’ai cravaché pendant des années, je dirai même qu’il y a eu quatre années difficiles. C’est dans l’effeuillage burlesque, -j’en fais depuis 6 ans, que je me suis sentie à l’aise et libre. Car je suis une drag-queen de troupe… Je me suis retrouvée au Cabaret burlesque à La nouvelle Seine et après, j’ai montré mes fesses un peu partout dans le monde.

Du côté de la gourmandise, vous êtes d’un côté en résidence culinaire au resto de La Nouvelle Seine, de l’autre, vous animez une émission de mini-cooking à voir sur 6play. Pourquoi ce grand écart entre le copieux et le réduit ?

Quand on m’a proposé l’émission, j’ai hésité peu de temps et j’ai adoré l’idée de lancer un défi aux invités, c’est ça qui m’a plu. Et le mini-cooking est une découverte où tout est possible, j’ai trouvé ça intéressant, minutieux, fun et aussi… apaisant.

Vous participez à la visibilité des corps voluptueux. Recevez-vous des témoignages qui vous remercient pour ça ?

Je suis comme La Briochée qui a dit qu’on était toujours content de voir un gros chien, un gros gâteau, j’emploie volontairement le mot gros. Des messages à ce sujet, j’en ai reçu des centaines et l’été dernier, des gens m’ont dit être allé à la plage pour la première fois, sans être couvert mais en maillot, après m’avoir vue. Ils ont osé montrer leur corps gros ou pas conforme, ils ont arrêté de le cacher, enfin.

(c) Eve Saint Ramon

Le drag connaît une explosion. Est-ce que ça aide les artistes à mieux gagner leur vie, à sortir d’un underground souvent précaire ?

J’ai connu ces difficultés et il m’est arrivé de refuser de travailler à 80 euros. Avec Drag Race France, nous avons pu montrer combien c’était un art complet : metteur en scène, costumier, perruquier, maquilleur, etc… On a pu valoriser ce travail et j’utilise ma voix pour dire « ça coûte tant, au minimum ». Il faut respecter le travail des artistes et tant mieux si ça commence à changer dans le bon sens.

Vous avez parlé du cancer, Lolita Banana du VIH, Moon de santé mentale. Croyez-vous que le drag mette en avant des sujets un peu effacés, pour sortir d’une sorte d’injonction permanente au bonheur ?

Le rôle de drag, sur scène et de mon point de vue, c’est faire sortir les gens de l’ordinaire, de les faire voyager. Chaque drag a son histoire, il y a du drame derrière le drag, derrière les paillettes. Un jour, une journaliste m’a demandé si on avait été casté en fonction de nos casseroles, je lui ai raccroché au nez. Le cancer, je ne voulais pas en parler au début, j’en avais longuement parlé avec Soa et décidé de ne pas aborder le sujet. Une personne de l’équipe qui faisait nos interviews, Adèle, m’a gentiment proposé de l’évoquer, sans rien m’imposer. J’y ai beaucoup réfléchi, j’en ai parlé et j’ai eu de nombreux et incroyables retours, notamment de gens en période de chimio qui m’ont dit que cela leur donnait de l’énergie pour se battre. Parler de son parcours, c’est donc aussi donner de la force.

Je suis célibataire avec mon chat, mais je ne me laisse pas abattre. C’est un choix, je n’ai pas le temps, ça n’est pas une priorité.

Quel conseil donneriez-vous à la personne que vous étiez quand vous aviez 18 ans, si vous deviez la croiser ?

N’écoute que toi, ne te laisse pas polluer par ceux qui pensent avoir la science infuse sur l’univers du drag, surtout quand ils n’en font pas eux-mêmes. Bosse, répète ! C’est ce que je dis à la baby-drag que je croise et qui me demande d’être sa mère. Je ne veux pas être mère, j’ai déjà du mal à me gérer moi-même ! Je leur demande ce qui peut les rendre uniques et je leur suggère de travailler leur présence scénique. Être juste belle, ça ne suffit pas et ça ne fonctionne pas.

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