Photos : Les garçons de Cédric Roulliat

Des garçons avec une plastique irréprochable, des décors qui racontent des histoires fortes, des couleurs renversantes, tel est l’univers de Cédric Roulliat. Il sort un nouvel ouvrage de photographies. Jock.life aime son travail léché et brillant…

Publié le

Tu sors un deuxième ouvrage, Déesses, Monstres et Petits Garçons. Est-ce que tu continues, comme dans le premier, à raconter des histoires comme on tourne des films ?

L’élan narratif reste inchangé. Dans la maquette du deuxième volume, j’ai voulu dessiner un parcours au sein des différents sous-univers : les corps dans la nature, au milieu du béton, en mouvement, la théâtralité et le monde du spectacle… Pour finir par un épilogue ouvert et inattendu. Comme pour le premier, en effet, les modèles sont souvent des personnages issus de mondes fictifs, pour lesquels j’aime imaginer un passé, des motivations, des pulsions. 

Cédric Roulliat

D’où viennent tes inspirations ?

Pour beaucoup, du cinéma de genre, en particulier hollywoodien, stéréotypé, celui qui se fonde sur un glamour un peu glacé pour mieux traquer les ressorts les plus sombres de la nature humaine : le film noir, fantastique ou d’épouvante. Mon autre source d’inspiration évidente est le travail d’autres photographes, mes maîtres : Helmut Newton, Guy Bourdin, Johnny Thornton, Jean-Paul Goude, Mondino, Lachapelle, Claude Cahun, Cyndi Sherman, Ryan McGinley, Antony Goicolea, Miles Aldridge… Enfin, toute la période artistique allant de la peinture symboliste, comme celle de Gustave Moreau, jusqu’au surréalisme de Luis Buñuel.

Cédric Roulliat

D’où vient cette obsession, que tu sembles avoir, de la distorsion des tailles (corps, décors…) ?

La question de l’échelle est fascinante : un corps minuscule égaré dans un univers le dépassant entièrement – cette solitude presque métaphysique me touche particulièrement – par ailleurs, l’élasticité des corps, leur souplesse ou leur force brute, le lien entre un corps effacé et un autre exhibé, la stylisation qui peut s’appliquer et leur conférer une qualité purement graphique. 

Cédric Roulliat

Le temps (ou l’époque) semble important dans tes photographies… A quel point ?

Au point de…non-retour ! Enfant, j’ai été exposé à des images de films, séries télé, mode ; la forte impression laissée par ces images se retranscrit par une reconstitution fétichiste des matières, couleurs et décors. Comme une façon d’accéder à un paradis entrevu à un âge où il dégage une magie incompréhensible. Le travail de mise en scène est une tentative de récréer cette émotion originelle. 

Cédric Roulliat

Le désir (du modèle ou du photographe) est omniprésent dans les photographies… Que signifie-t-il pour toi  ?

Dans les images que je produis, la seule chose qui compte est le désir, non du modèle, mais du personnage qu’il incarne. C’est d’ailleurs une compétence cruciale pour un modèle, ce en quoi il se rapproche du travail de comédien : cette faculté à se projeter dans le corps et les émotions d’un autre.  

Cédric Roulliat

Quel est ton plus beau souvenir de photographie ?

J’aurais du mal à en isoler un seul, ayant eu la chance de vivre de nombreuses séances marquées par l’excitation ludique d’investir des lieux uniques en compagnie de modèles, coiffeurs, maquilleurs et assistants extraordinaires. Je garde un souvenir très joyeux d’une séance avec l’incroyable et plus grande que nature Liliane Montevecchi, peu de temps avant sa mort, au théâtre Antoine.

Liliane Montevecchi
Cédric Roulliat

Elle ponctuait chaque pose avec les boys d’un rire unique qui était sa signature, et nous a ensuite régalé, à la pizzeria du coin, de souvenirs de son passage par Hollywood quelque 60 ans plus tôt. Elle n’avait commandé qu’une coupe de champagne pendant que nous nous jetions sur les Regina et Margarita. Je remercie encore Patrick Niedo pour ce moment hors du temps. 

Cédric Roulliat

Tu as des projets ?

Le seul qui tienne : continuer à capturer les corps, beaux et étranges, et leurs tourments, dans des décors qui partagent une âme avec les modèles (je suis par ailleurs à la recherche perpétuelle de lieux uniques, graphiques et spacieux, principalement à Lyon et Paris).  

Cédric Roulliat

Vous pouvez suivre et retrouver le travail de Cédric Roulliat sur Instagram ou sur son site

Tu en veux encore ?