David Bolito : “Celui qui dit qu’il s’ennuie à Lyon, il ne fait vraiment pas d’effort !”

David Bolito est le gérant et propriétaire de la boutique lyonnaise Blitz, joyeux bazar qui regorge de pépites kitsch ou géniales, et souvent introuvables ailleurs. Il est également DJ, notamment pour les soirées Garçon Sauvage et Kinky France.

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Comment as-tu eu l’idée d’ouvrir une boutique comme Blitz ?

J’ai toujours rêvé d’avoir une galerie d’art, mais sans le côté exclusif, limité à ceux qui en ont les moyens. Et puis il y avait plein de bouquins ou de revues qu’on ne trouvait pas à Lyon, comme Kink, et je trouvais que ça manquait. Ça m’amuse de vendre une revue porno gay vintage qui, à l’époque de sa sortie, devait sans doute être placée tout en haut des rayonnages d’un tabac-presse, à côté d’une céramique réalisée par un jeune créatif. C’est comme si ce bazar me permettait de rendre visible et donc de dédramatiser des sexualités minoritaires, d’autres manières de vivre. Ça ne choque absolument pas les gens de feuilleter ce genre de revues lorsqu’ils viennent acheter tout autre chose.

Quels types d’objets y trouve-t-on?

J’entends parfois dire que Blitz est une boutique de gadgets et rien ne me vexe plus, parce qu’on en trouve très peu en vérité ! J’aime qu’un objet soit à la fois pratique, fonctionnel, intéressant et esthétique. Récemment, j’ai rapporté de Venise de très belles céramiques, de petits bols ornés de dessins d’hommes en érection et façonnés par un vieux monsieur dans sa boutique, près de l’Arsenal (quartier de l’ancien chantier naval de Venise, NdlR).

C’est de l’artisanat qui reste accessible au plus grand nombre (25 € le bol), malgré l’unicité de la pièce. Mais c’est vrai que j’ai aussi des objets plus chers. Autre exemple : je viens d’acquérir une revue de Barcelone, Donovan, qui est une compilation de fac-similés de publicités, de petites annonces et de photos érotiques publiées dans la presse gay des années 70-80. C’est super intéressant de découvrir la façon dont vivaient les homos à l’époque. Et les premières annonces qui parlent du sida sont hyper-poignantes.

Tu n’es pas seulement commerçant, mais aussi DJ…

Oui, enfin… J’ai toujours une hésitation à me qualifier de DJ, parce que je fais ça en dilettante. Mais je me suis quand même retrouvé à mixer au Sucre, l’un des temples lyonnais de l’électro, avec mon disque de Raffaella Carrà ! Ça m’amuse de passer de la musique “impure” dans un lieu prisé par les puristes. C’est aussi un peu ce que je fais dans la boutique, d’ailleurs ! J’ai mixé à la Garçon Sauvage, à la Kinky France, au Lavoir Public, dans quelques soirées privées… Depuis que Blitz a pris de l’ampleur, j’essaye d’arrêter les sets, parce que ça me prend trop de temps. Mais le bonheur de faire danser 800 personnes au Sucre, ça n’a pas de prix, c’est vraiment comme une messe…

Ton prochain set, ce sera durant la Kinky France, une soirée organisée par le collectif PlusBelleLaNuit dans le cadre du festival Intérieur Queer (du 31 octobre au 3 novembre). Quel est le concept de cette soirée ?

Montrer que, musicalement, il se passe des choses dingues dans ce pays. Par exemple, j’ai déniché une version à l’accordéon de YMCA des Village People : c’est du grand n’importe quoi mais c’est extrêmement joyeux ! D’une façon générale, j’aime exploser les limites, explorer des genres musicaux méprisés.

Comment fais-tu pour trouver les morceaux que tu passes durant tes sets ?

J’y passe un temps fou ! J’ai quelques “floorfillers” incontournables qui reviennent très souvent dans mes sets, mais j’essaye toujours d’y inclure un gros pourcentage de nouveautés. Dans mes morceaux fétiches, il y a par exemple une track de disco turque, Disco Kebapun remix électro de DJ de Diam’s par Comité central, du baile funk brésilien… Ce sont toujours des choses impures, hybrides… Bon, cela dit, je peux aussi passer de l’électro plus classique, ou de la disco flamboyante façon Paradise Garage (discothèque gay new-yorkaise ouverte de 1977 à 1987, NdlR). J’ai aussi une playlist Spotify pour la boutique, Radio Blitz, très différente, pas du tout faite pour danser. C’est un peu mon jardin secret, avec de la country, de la pop, de vieilles chansons réalistes françaises, des musiques de films… En fait, ça ressemble un peu à ce que je vends : c’est un bazar de choses qui ne sont pas censées être ensemble.

Où sors-tu, ailleurs bien sûr que dans les soirées où tu mixes ?

Le soir, après la fermeture, la boutique prend une seconde vie. J’organise ce que j’appelle des “apéros Blitz”, des fêtes semi-improvisées durant lesquelles on boit des coups sur le trottoir. Sinon, j’aime bien le Lavoir public ou le Super 5, un endroit qui n’est pas du tout communautaire mais où on trouve beaucoup de gens de la communauté LGBT. Et même si je suis pour les espaces non-mixtes, ce mélange des genres me plaît. Après, je vais bientôt avoir 50 ans, j’ai moins d’énergie qu’autrefois. Ma façon de faire la fête a changé. Mais je ne suis pas du tout nostalgique, car je trouve qu’il ne s’est jamais passé autant de choses à Lyon. C’est génial d’avoir tout ce choix. Celui qui dit qu’il s’ennuie à Lyon, il ne fait vraiment pas d’effort !

Kinky France, avec David Bolito, L’Homme seulDJ P. Moore et la fanfare Les Krapos
Vendredi 1er novembre de 17h à 23h
Chez Heat, 70 quai Rambaud – Lyon 2e – Dans le cadre du festival Intérieur Queer

Blitz, 4 rue Louis Vitet – Lyon 1er 
 04 78 39 75 97 / www.blitzbazar.com / www.instagram.com/blitz_lyon / www.facebook.com/blitzlyon

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